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La cause des enfants en Haute-Loire
orientale. Culture protestante et dynamisme associatif au XXème
siècle.
Gérard Bollon
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Ainsi donc aujourd'hui encore, en dépit de
forts brassages de populations, la grande majorité des habitants
du Plateau sont convaincus de leur vocation humaine à gérer
leur pays et s'engagent dans la vie de multiples associations, syndicats
intercommunaux ou groupes de pression extra-communaux.
La seconde moitié du XXème
siècle connaît enfin une ultime tranformation avec
la création d'associations à caractère sanitaire
et social afin de répondre à des besoins particuliers
de l'enfance.
En 1948, quelques pionniers de l'accueil vellave fondent l'association
pour la Sauvegarde de l'Enfance et de l'Adolescence de la Haute-Loire.
De leur côté les associations caritatives du Plateau
protestant transforment leurs maisons en lieux d'éducation
surveillée pour de jeunes délinquants de la Drôme
(tel est le cas de la maison des Roches au Chambon-sur-Lignon) ou
l'Atelier Cévenol pour le travail manuel du bois ou encore
en ferme-écoles permettant aux jeunes citadins d'apprendre
à cultiver la terre et à effectuer des essais de cultures
nouvelles.
Dès lors, les pensions d'enfants du Plateau se transforment
en maisons agréées et parfois
spécialisées. Des associations loi 1901,
qui les gèrent, recherchent un agrément soit par l'aide
sociale, soit par l'aide médicale. Naissent alors "Le
Grand Air" et "Les Pâquerettes", "Faïdoli"
maisons à caractère sanitaire et médico-pédagogique
; mais aussi "La Joyeuse Nichée" et "La Clé
des Champs" qui fusionnent pour former aujourd'hui "Les
Ecureuils", "Le Mazel" maisons à caractère
social.
En général ces établissements spécialisés
sont à but non lucratif et obtiennent leur prix de journée
d'une tutelle administrative.
Aujourd'hui, 180 enfants environ d'origines sociales et géographiques
très diverses (Haute-Loire, Loire, Ardèche, Drôme,
Rhône) sont accueillis et trouvent pour beaucoup leur seul
et véritable foyer. Tous les adultes salariés, de
l'éducateur à la lingère, participent à
une même action : aider le petit de l'homme à devenir
homme dans toute sa plénitude.
Finalement, en suivant les évolutions du
siècle finissant, qui sur le Plateau pourrait contester la
sollicitude pécuniaire, matérielle, éducative
des associations au profit des enfants ?
Bien sûr les figures de l'enfant en danger ne sont pas les
mêmes selon les périodes : petits citadins ouvriers
puis jeunes persécutés pour des motifs raciaux ou
politiques et enfin enfants défavorisés du fait de
leur appartenance à des groupes sociaux exclus.
Il existe cependant des constantes au fil des ans dans l'attitude
des associations qui oeuvrent en faveur des enfants : respect de
l'enfant, volonté de reconstruire.
Pourtant aujourd'hui la vie associative à caractère
social ne peut plus se limiter au bien-être matériel,
à un prix de journée et à l'encadrement pédagogique
décidé par un Conseil d'administration ou une tutelle.
Sur le Plateau, beaucoup pensent que lesdites associations doivent
désormais s'interroger, non seulement sur l'ampleur de leur
rôle et de leur gestion, mais aussi sur leur orientation.
On sait depuis longtemps que les structures éducatives, notamment
associatives, sont toujours nécessaires ; mais on commence
à comprendre que les réponses apportées ne
peuvent plus se limiter à un encadrement éducatif.
Pour bien des ados du Plateau, il manque toujours avec acuité
des structures d'accueil et d'écoute.
C'est donc un long travail auquel toutes les structures associatives
de la région tentent de contribuer, conscientes que tout
repose finalement sur ce simple propos : "Tout est cousu
d'enfance" (8).
En définitive, cette éthique sociale, associative,
au profit des plus jeunes, qui se double d'ailleurs d'une économie
sociale non négligeable, n'est pas une attitude naturelle,
mais plutôt le parti pris des hommes du Plateau vellave de
vivre communautairement au sein d'associations loi 1901 et qui veulent
être au service de l'enfance.
En tout cas, cette façon associative et donc communautaire
de vivre conserve toujours sa vigueur. Elle invite toujours à
bien des témoignages : celui de la liberté et du respect
des autres, du partage avec les plus faibles, celui surtout de l'audace
pour contester ce qui doit l'être en particulier le non-respect
des droits de l'homme et des enfants, le rejet de l'étranger,
l'égoïsme grandissant et les tentations de repli sur
soi...
Alors oui, on peut l'affirmer le protestantisme vellave a imprimé
sa marque sur la vie associative. Il se nourrit d'ailleurs toujours,
à l'écoute du monde, d'expériences individuelles
et d'actes quotidiens ayant souvent comme ligne de mire l'Autre
et plus particulièrement l'enfant.
Gérard Bollon
(8)
Brisset (C) - "Tout est cousu d'enfance" - Le Monde
diplomatique - janvier 2001.
Nases (P) - "Accueils provisoires et placements d'enfants
et d'adolescents" - Rapport de l'IGAS (Ispection Générale
des Affaires Sociales) - juin 2000.
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